Réduction de CdR – CdL

Procédure pour la réalisation de mesures photométriques sur astéroïdes

Ce document décrit l’acquisition de mesures photométriques et leur réduction en courbes de rotations d’astéroïdes à l’aide du logiciel Prism pour une utilisation au T60 de l’observatoire du Pic du Midi.


1. Introduction aux Courbes de Rotations

L’étude des petits corps du système solaire est une activité passionnante où l’astronome amateur a toute sa place pour apporter sa contribution à la recherche scientifique. Les techniques de photométrie ont subi une petite révolution il y a une dizaine d’années avec l’émergence des caméras CCD jusque dans le monde amateur. Une importante quantité d’astéroïdes sont aujourd’hui accessibles à l’instrumentation dont disposent les amateurs et, par rapport aux professionnels, ils bénéficient d’un temps d’observation plus important.

La réalisation de courbes de rotations d’astéroïdes consiste à mesurer la luminosité apparente d’un astéroïde au cours du temps. L’analyse de ces mesures permet de déterminer la période et l’orientation de l’axe de rotation de l’astéroïde, la présence de satellites (astéroïdes binaires ou multiples), voir même la masse et la densité du corps. Des études plus poussées permettent également de reconstruire la forme en 3D de l’astéroïde à partir de plusieurs courbes de rotations et de profils d’occultations d’étoiles.

La variation de luminosité que l’on cherche à mesurer est relativement faible, typiquement quelques dixièmes de magnitude. L’enjeu est d’atteindre des résolutions photométriques relatives de la classe du pour cent ou mieux. Un télescope de grand diamètre, une camera CCD et un procédé de réduction photométrique propre permet d’atteindre voir de dépasser cet objectif de performance.


2. Choix de l’astéroïde cible

Une sélection d’astéroïdes à observer est disponible sur le site de Raoul Behrend, astronome professionnel à l’observatoire de Genève, qui coordonne les observations d’astéroïdes et d’étoiles variables. Les astéroïdes sont classés par priorité et des campagnes d’observations ciblées sont régulièrement menées.

Benoît Carry, astronome professionnel à l’observatoire de Paris, propose également tous les mois une liste d’astéroïdes à observer pour créer des modèles 3D à partir de CDR, d’occultations et d’imagerie directe par optique adaptative. La liste est donnée chaque mois sur la liste AUDE et est reprise dans les éphémérides de Raoul Behrend.

L’astéroïde choisi doit être à une hauteur suffisant au dessus de l’horizon (h>30°) et son suivi doit être possible sur au moins 30% de sa période de rotation.

Il est conseillé de choisir un astéroïde visible en début de nuit au dessus de l’horizon EST et de le suivre tout au long de la nuit afin de couvrir la plus grande partie possible de sa courbe de rotation. Il est également nécessaire de vérifier que l’astéroïde ne passera pas à proximité d’une étoile pendant la nuit, qui risquerait de perturber l’exploitation photométrique.
Pour débuter, un astéroïde à forte variation de luminosité et à courte période est recommandé. Choisir par exemple un astéroïde numéroté entre (1000) et (2000).


3. Acquisition des images

La configuration de l’instrumentation employée pour l’acquisition des images est la même que pour une séance d’astrophotographie du ciel profond. La caméra STL 6303E doit être montée sur le foyer Newton du T60 avec son correcteur de Wynne.

Les images des objets faibles doivent être acquises sans filtre devant la caméra CCD. Pour les objets très brillants, l’emploi d’un filtre R peut être recommandé. Le fenêtrage de la caméra doit être en trame entière et en Binning 1×1 si possible afin de sur-échantillonner l’astéroïde et les étoiles de références. Ne pas oublier de remplir l’entête des images : Télescope, Observateurs, Focale, Lieux d’observation, Caméra, Taille des pixels… Les coordonnées de centre de champ sont remplies automatiquement par la position des codeurs du T60.

Pour pointer l’astéroïde au T60, ouvrir la carte du ciel et sélectionner les options d’affichages. Dans l’onglet Astéroïdes, charger la base et rechercher l’astéroïde à observer. Ajouter l’astéroïde à la liste des astéroïdes à afficher et revenir sur la carte du ciel. L’astéroïde est maintenant affiché dans la partie supérieure gauche de la fenêtre. Un double clic sur son nom centre la carte du ciel sur la position de l’astéroïde. Il ne reste plus qu’à déplacer le télescope sur l’astéroïde et à lancer une acquisition.

Afin de repérer l’astéroïde sur l’image acquise, aller dans le menu :
Analyse > Astrométrie > Etalonnage automatique

Renseigner la focale du télescope (1998mm avec le correcteur de champ Wynne) et la taille des pixels (9µ pour la STL 6303E).

Sélectionner le catalogue de référence et son chemin de répertoire.

Nombre Max d’étoiles de comparaison du catalogue :
PrismV6 = 150
PrismV7 = 200

Désactiver la fonction « image orientée Nord/Sud »

Une fois l’étalonnage astrométrique réalisé, choisir un polynôme de degré 2 et calculer le modèle.

L’image est à présent étalonnée, à chaque pixel correspond une coordonnées Alpha et Delta.

Pour repérer l’astéroïde, cliquer sur le menu :
Analyse > Montrer les astéroïdes
Prism va alors afficher tous les astéroïdes présents dans le champ. Il ne reste plus qu’à recentrer l’astéroïde recherché dans l’image.




Effectuer une centroïde sur l’astéroïde pour mesurer son rapport Signal/Bruit et sa FWHM (largeur à mi-hauteur). Veiller à respecter un rapport Signal/Bruit > 50 et une FWHM comprise en 2 et 5 pixels.

Note : sous Prism 7, l’étalonnage astrométrique plante si la FWHM des étoiles est supérieure à 5 pixels. L’utilisation de Prism 6 permet bien souvent de résoudre le problème.

Faire varier le temps de pose en fonction de la dynamique et du rapport Signal/Bruit de l’astéroïde. Des temps de poses inférieurs à 120s ne nécessitent pas d’autoguidage en général.

Note : typiquement, un temps de pose de 50 secondes en Binning 1×1 est bien adapté pour un astéroïde de magnitude 12. Pour un astéroïde plus faiblement lumineux il faudra allonger le temps de pose et augmenter le Binning. Par exemple, il convient d’utiliser un temps de pose de 120 secondes en Binning 2×2 pour un astéroïde de magnitude 16,5.

Une fois toutes ces étapes réalisées, lancer les acquisitions en boucles avec sauvegarde automatique des images.

A la fin de la nuit d’observation, lorsque le fond de ciel commence à monter, ne pas oublier de réaliser les Darks, Offsets et Flats nécessaires pour le prétraitement des images. Pour cela, utiliser les menus dédiés : Caméra > Acquisition des Flats, Noirs, Offset

Note : pour l’acquisition des Flats : orienter le télescope au Sud à 45° de hauteur, couper la motorisation MCMT et lancer l’acquisition des flats 40 minutes avant le levé du soleil.

Il est préférable de réaliser une vingtaine d’images pour chaque série afin d’en faire une somme médiane.

Note : conserver toutes les images brute, tant celles sur le ciel que les correctrices.

4. Prétraitement

Le prétraitement de la série d’images doit être réalisé de manière standard. Commencer par créer les images correctrices de Flat, Dark et Offset.

Cliquer sur le menu :
Prétraitement > Créer Flat, Dark, Offset maitre

Vérifier que le vignetage présent sur le Flat est cohérent avec les images de la série.

La correction du Flat est particulièrement important pour la suite. Il est en effet important de réduire au maximum l’effet du vignettage pour obtenir des mesures fiables.

Soustraire les images correctrices à la série d’images. Pour cela, cliquer sur le menu :
Prétraitement > Enlever Offset, Noir, Flat (auto)


Remplir les champs nécessaires à l’opération. Veiller à ne pas faire de registration des images et à ne pas faire d’addition.


5. Réduction des mesures

Pour l’étalonnage astrométrique il est nécessaire d’avoir un catalogue stellaire GSC-1.1, USNO A2.0, UCAC2 ou UCAC3.

Note : le catalogue USNO-A2.0 est bien adapté

a. Coordonnées du centre de champ

Le script de réduction utilise les coordonnées du centre de champ des images. Ces coordonnées doivent être entrées dans l’entête de toutes les images de la série.

Note : dans le cas du T60, les positions Alpha et Delta des codeurs sont enregistrées automatiquement dans l’entête des images lors de l’acquisition. Il n’est donc pas nécessaire d’effectuer cette étape.

Ouvrir une image de la série faire un étalonnage astrométrique (cf : chapitre 3).

Revenir sur l’image et aller dans le menu :
Visualisation -> Grille sur l’image
Le centre de l’image est matérialisé par une croix. Positionner le curseur de la souris sur la croix et noter les coordonnées Alpha et Delta du centre de champ indiquées dans le bas de l’image :

Il ne reste plus qu’à remplir les coordonnées du centre de champ dans l’entête de la série d’images.

Pour cela, aller dans le menu :
Fichier -> Remplir l’entête de fichiers images avec …

Sélectionner la liste des images et dans l’onglet Astrometrie : Mettre à jour Alpha/Delta

b. Etalonnage astrométrique de la série d’images

On utilise un script automatique pour faire l’étalonnage astrométrique de toutes les images qui serviront à la réduction.

Ouvrir le script EtalonageAstrometriqueSeriesImages.pgm dans un éditeur de texte et modifier les paramètres utilisateurs :

  • Renseigner le répertoire du catalogue de référence (l. 18) et sa catégorie (l. 34).
  • Image orienté Nord/Sud : NSo=FALSE
  • Nombre d’étoile de comparaison utilisé dans le catalogue : PrismV6 = 150 et PrismV7 = 200
  • Nombre d’étoile de comparaison utilisé dans l’image : PrismV6 = 150 et PrismV7 = 200
  • Degré du polynôme de correction de la déformation de l’image : DegPoly=2
  • Réserve de largeur sur la fenêtre d’une image : largFen=350

Exécuter le script (Fichier -> Executer Script) et sélectionner la série d’images.

c. Réduction photométrique de la série d’images

Ouvrir le script MesureUnAsteroideParAstrometrie.pgm dans un éditeur de texte et modifier les paramètres utilisateur :

  • Taille de la demi fenêtre de mesure : DemiLargFen= 3 fois la FwhmM de l’astéroïde
  • Remplir les paramètres d’entête du fichier de mesure : CodeObs, Filtre (C = sans filtre), CatPhoto, DefDat$= »0″, …)

A présent il faut sélectionner les étoiles étalons. Pour cela, on créé une liste d’objets à observer (liste LST) à l’aide de la carte du ciel de Prism.

Régler la carte à la date de l’image : clic droit -> mettre la carte à la date d’une image CCD
Centrer la carte sur l’image : clic droit -> centrer la carte du ciel sur une image CCD
Zoom suffisant pour ne pas prendre en compte la largeur de fenêtre (largFen=350)

Modifier les options d’affichage de la carte du ciel pour afficher l’astéroïde et le catalogue d’étoile utilisé pour l’étalonnage astrométrique.

  • Sélectionner l’astéroïde : Identification d’un objet > Ajouter à la liste des objets à observer
  • Sélectionner l’étoile de test : identifier une étoile sur la carte à proximité de l’astéroïde, proche de sa magnitude (+/- 1Mag) et avec une différence MagB et MagR inférieure à 1.
  • Sélectionner les étoiles étalons : mêmes critères que l’étoile de test.

Le premier objet contenu dans une liste LST est l’astéroïde à mesurer. Le deuxième objet et une étoile test de référence. Le reste des objets sont les étoiles étalons qui vont servir à effectuer la mesure.

Note : sélectionner des étoiles proches du centre de champ. Les étoiles situées en bord de champ ne seront pas prises en compte par le script de réduction et peuvent subir les effets de vignetage.

Sauvegarder la liste dans le dossier final (liste.lst).

Exécuter le script MesureUnAsteroideParAstrometrie.pgm, sélectionner la liste LST, et sélectionner la série d’images.

Une fois le script terminé, deux courbes sont affichées à l’écran : une courbe de lumière de l’étoile étalon et une courbe de lumière de l’astéroïde.

Sauvegarder le résultat du script et les courbes obtenues dans un dossier.

Le dossier final doit contenir :

  • les images brutes ;
  • les images étalonnées ;
  • les scripts ;
  • la liste LST ;
  • le résultat du script en fichier texte ;
  • les courbes de l’étoile étalon et de l’astéroïde au format txt et en pdf.

Si les courbes obtenues sont satisfaisantes (faible variation de l’étoile étalon, pas de mesures aberrantes …) vous pouvez envoyer par mail le résultat du script de mesure à Raoul.

Note : pour l’envoi des mesures à Raoul Behrend, supprimer les premières lignes du résultat du script qui n’ont pas d’intérêt majeur. Le fichier texte à envoyer doit commencer par FMT xDVv et se termine par la dernière mesure. Pour être correctement crédité des observations, il faut bien respecter le format de la ligne MES, et mettre les prénoms en complet.


6. Pour aller plus loin …


  • Site de Raoul Behrend, astronome professionnel qui coordonne les observations d’astéroïdes et d’étoiles variables. De nombreux conseils sont donnés sur l’acquisition, la réduction et l’exploitation des mesures photométriques.


  • Site de Laurent Bernasconi, astronome amateur et créateur des scripts de réduction sous Prism. Vous y trouverez des explications détaillées sur l’utilisation des scripts ainsi que des conseils pour optimiser la qualité de vos mesures.


  • Site du CALL (Collaborative Asteroid Lightcurve Link). Vous pourrez y trouver le catalogue Harris qui donne les périodes de rotations pour les astéroïdes déjà mesurés.

Recherche

Copyright © Romain Montaigut 2010-2013